L'annonce

J’ai toujours voulu des enfants, et j’ai longtemps pensé que je ne pourrais pas en avoir. Je ne sais pas pourquoi, mais j’étais convaincue que ça ne marcherait pas, que je ne pourrais pas tomber enceinte. Un des rares souvenirs que j'ai de mon enfance, c'est quand je jouais en haut, dans notre salle de jeu, avec mon bébé. Je me souviens très bien des couches et de l'odeur du talc. Yann, de son côté, essayait depuis 3 ans de faire un enfant avec son ex. On était collègues & potes, il n'en parlait pas beaucoup mais on savait, un peu. J'ai su après qu’il n’était pas totalement convaincu, qu’au fond de lui il se disait que ce n’était peut-être pas la bonne personne. N’empêche. Ça ne marchait pas. Le protocole FIV était engagé. Et puis leur séparation, et puis nous, l’insouciance & l'évidence. On ne pensait pas ça possible, alors on ne faisait pas attention. Je suis "tombée" enceinte moins de trois mois après notre rencontre. La surprise, l’étonnement, l’incrédulité. Sans rien demander, j’y avais droit.
Et puis l’annonce, un samedi de mars au restaurant. Un mot laissé à la maison le matin même : « Retrouve-moi à 13h en haut des Champs Elysées, ne pose pas de questions ». Il m'a retrouvée, on s'est installés dans le restaurant, j'ai commandé un verre de vin blanc. On a parlé, il m'a demandé pourquoi ce mot mystérieux. Je lui ai tendu un cadeau. Un body de bébé taille naissance. Il n’a pas compris. Alors je lui ai offert le deuxième cadeau. Le test de grossesse avec les deux traits dessus. Il a compris. Il a bu mon verre de vin. On est devenus 3.

Pour Ulysse, tout était très différent. J’attendais tellement que Yann soit prêt à avoir un deuxième enfant. Quand il m’a enfin dit qu'il se sentait prêt, j’étais persuadée de retomber enceinte aussi vite que pour Roméo. Comme une justice, une compensation pour ces deux années à attendre. Mais 8 mois sont passés. Sans rien. À ne penser qu’à ça, à tout calculer. La surprise, l’étonnement, l’incrédulité. Mais pas les mêmes que la première fois. Et puis "c’est enfin arrivé". On est à nouveau allés au restaurant. Sans mot laissé sur la table cette fois. Je lui ai tendu une photo. Un photomaton de 4 poses différentes. Sur chaque image je tenais une feuille avec un mot différent écrit dessus. « Tu - vas - être- papa ». Le « être » n’était pas très lisible, il y a un reflet sur l'image. Il n’a pas compris. Alors je lui ai offert le deuxième cadeau. Le test de grossesse avec les deux traits dessus. Une deuxième fois. Il a compris. J'ai bu la moitié de mon verre de vin. On est devenus 4.